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Gestion responsable des déchets de construction
Ou comment arrêter de jeter comme au siècle dernier quand on construit pour demain
Le chantier, c’est le royaume du gaspillage. Personne n’ose vraiment le dire, mais tout le monde le sait. Des mètres cubes d’isolant jamais utilisés, des palettes de carrelage intactes laissées à l’abandon, des sacs de mortier encore fermés jetés à la pelle dans des bennes pleines à craquer. Parce que c’est plus rapide. Parce que "on n’a pas le temps de trier". Parce qu’il faut finir.
Bienvenue dans l’angle mort du bâtiment.
Celui qu’on regarde à peine. Celui qu’on camoufle sous de vagues mentions dans les appels d’offres : "gestion raisonnée des déchets", "tri sélectif sur site", "valorisation en fin de chantier". De jolies formules, bien propres, pendant que des tonnes de gravats filent vers des décharges hors de prix, à quarante kilomètres de là, sans qu’on sache vraiment ce qu’ils deviendront.
Mais là encore, il y a ceux qui s’en foutent. Et ceux qui s’organisent.
Parce que gérer les déchets, ce n’est pas une faveur faite à la planète. C’est une question de responsabilité. De sérieux. De cohérence. Comment parler de ville durable si l’on continue à jeter sans conscience, à enfouir ce qu’on pourrait revaloriser, à ignorer que chaque mètre cube de déchet, c’est du carburant brûlé, de la matière première perdue, du travail inutile ?
Le vrai défi, ce n’est pas de trier. C’est de prévoir.
Le chantier qui produit peu de déchets, c’est celui qui a été pensé en amont. Bon métrage. Commandes ajustées. Coordination fluide. Aucun artisan qui perce pour "voir ce qu’il y a derrière", aucune démolition inutile, aucun "au cas où" transformé en montagne de chutes.
Et quand il faut trier, il faut le faire sérieusement. Pas avec une benne "tout‑venant" et un autocollant vert dessus pour se donner bonne conscience. Il faut séparer, nettoyer, organiser. Il faut travailler avec des filières. Comprendre où part chaque chose. Ce que ça coûte. Ce que ça évite.
Mais voilà : ce tri‑là, ce travail‑là, est invisible.
Il ne brille pas. Il ne se voit pas sur les photos de chantier. Il ne fait pas gagner d’argent tout de suite. C’est un effort sans prestige. Et pourtant, il dit tout d’une entreprise. Tout de son sérieux. Tout de son engagement réel, au‑delà des mots.
Il y a ceux qui appellent ça une contrainte. Et puis il y a ceux qui y voient une forme de respect.
Pour le travail. Pour les matériaux. Pour le monde qu’on laisse à ceux qui viendront vivre dans les immeubles qu’on construit aujourd’hui.
La benne n’est pas un trou noir.
C’est le miroir de nos pratiques. Elle dit ce qu’on tolère. Ce qu’on néglige. Ce qu’on bâcle.
Et s’il faut commencer quelque part pour rendre le bâtiment plus propre, alors c’est là. Dans cette foutue benne. Là où tout finit. Là où il faudrait, justement, recommencer.